Ce matin nous avons appris que le grand écrivain, philosophe et critique littéraire français d'origine bulgare Tzvetan Todorov nous a quittéс à l'âge de 77 ans. Homme des Lumières, il avait décortiqué la pensée coloniale, laquelle en se réclamant de l'universalisme justifiait l'oppression de l'Autre. Amoureux de la liberté, il avait dénoncé dans ses livres tous les totalitarismes du 20e siècle. Dans le monde d'aujourd'hui, Tzvetan Todorov demeure un des rares penseurs humanistes. Dans "Nous et les Autres" il écrivait. "Je n’ai pas vu ces maux-là de mes yeux ; mais je sens leur parenté avec ceux dont j’ai fait l’expérience personnelle, et je n’ai pas d’hésitation à reconnaître un mal comme un mal (…). J’ai le sentiment de tenir là une sorte d’absolu, qui ne me quittera jamais ; mon attachement à l’idéal démocratique n’est pas seulement rationnel : le sang me monte à la tête quand on le met en question, et je sens que je me hérisse contre mon interlocuteur".

En sa mémoire nous republions aujourd'hui l'interview faite par Maria Dimitrova en 2010, à l'occasion de la sortie du livre « La peur des barbares ». Tzvetan Todorov y condamne la guerre en tant qu’instrument pour résoudre les problèmes en Afghanistan et, plus tard, en Irak. Dans cet ouvrage il lance l’avertissement que le sentiment de peur conduit l'Occident qui se prétend "civilisé" à se comporter de manière barbare. Il met en garde contre l'emploi des termes comme « choc des civilisations » ou « guerre des cultures ». 

Tzvetan Todorov qui a vécu sa jeunesse en Bulgarie est devenu le penseur français de l’universel et le fin connaisseur de Montesquieu, Voltaire et Rousseau. Européen, il est aussi un peu Canadien de par son épouse, la grande écrivaine Nancy Huston. C’est dans ce contexte que nous lui avons demandé si, à son avis, une « identité européenne » peut réellement exister.