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La Réunification ou quand le rêve devient réalité

L’entrée d’Alexandre I à Plovdiv, le 10 septembre 1885
Photo: militarymuseum.bg

Le 3 mars 1878 se réalisait l’un des rêves les plus chers des patriotes bulgares – au bout d’un joug cinq fois séculaire dans les limites de l’Empire ottoman, la Bulgarie réapparaît enfin sur la carte politique de l’Europe. La liberté chérie est enfin gagnée mais l’idéal national des héros de la Renaissance bulgare s’évapore malheureusement peu de temps après.

Le 13 juillet 1878, trois mois uniquement après la signature du Traité de San Stefano, le congrès de Berlin de la même année oppose son véto à la création d’un vaste Etat bulgare. Le Nord de la Bulgarie et la région de Sofia demeurent sous la tutelle du sultan et prennent l’appellation de Principauté de Bulgarie. La Roumélie Orientale voit alors le jour, ainsi que d’autres territoires à dominante population bulgare /la Macédoine, la Thrace d’Andrinople, la montagne des Rhodopes et de la Strandja/ demeurent dans les limites de l’Empire ottoman et sont privés de droit à l’autodétermination.

Les populations du Sud de la Bulgarie protestent avec véhémence, se montrent prêtes à entrer en résistance, ce qui exerce un certain effet sur les décisions du congrès de Berlin. Des troupes militaires ottomanes ne sont pas stationnées dans la région, les forces armées et les forces de l’ordre recrutent uniquement des Bulgares, le mode de gouvernance est relativement démocratique avec une assemblée issue d’élections libres et une presse libre également. Le sultan désigne Aléko Pacha Bogoridi, homme politique ottoman d’origine bulgare, au poste de premier gouverneur général de la Roumélie Orientale. Il arrive à Plovdiv, coiffé d’un chapeau traditionnel bulgare ce qui est interprété comme un bon signe prometteur par la population.

Des activistes nationalistes,été 1885. 3e et 4e de gauche à droite assis au premier rang : Prodan Tichkov – Tchardafon et Zacharie Stoyanov. Photographie de Dimitar Kavra

En dépit de sa séparation artificielle de la Bulgarie, la Roumélie Orientale connaît un bon développement économique et culturel. Pourtant ce statu quo est inacceptable pour la majorité des Bulgares. Le plus logique et naturel serait de voir la réunification de la Roumélie Orientale, qui a préservé son caractère bulgare comme un premier pas vers la réunification de tous les territoires bulgares. La question nationale est au cœur du débat politique de part et d’autre de la ligne de séparation. En Roumélie Orientale, on remporte les élections en promettant une réunification toute proche, voire imminente. Or personne n’est en mesure d’en fournir le mode opératoire. Les contacts sur la scène internationale établis par des hommes politiques issus des « deux Bulgaries » ne sont guère encourageants. La position officielle des grands acteurs européens stipule que la réunification aura bien lieu mais „ en perspective et non pas maintenant”.

Les choses commencent à bouger en 1885, lorsque Zacharie Stoyanov, politique et journaliste connu, prend la tête du mouvement pour la réunification, un des rares organisateurs de l’Insurrection d’Avril de 1876 contre le pouvoir ottoman, rescapé des massacres. C’est en Roumélie Orientale qu’il donne libre cours à ses talents de leader doublé d’un journaliste à la plume acérée, ce qui lui permet de créer une puissante structure – le Comité Central Révolutionnaire Bulgare.


Un fort soutien pour le processus de la Réunification est accordé également par le prince Alexandre Ier de Bulgarie ou Alexandre de Battenberg qui déclare accepter le titre « Prince de la Bulgarie du Nord et du Sud ».

Or, les différends entre les Grandes Puissances qui ont abouti au démembrement de la Bulgarie sept ans plus tôt, semblent cette fois-ci favorables à l’acte audacieux et révolutionnaire bulgare. La plupart des grands acteurs, en première ligne la Russie et la Grande-Bretagne, s’opposent au retour du statu quo manu militari par le sultan. La Russie réclame le changement du pouvoir à Sofia, mais elle ne veut pas la défaite de la Bulgarie. La cause bulgare bénéficie de l’appui tacite de la Grande-Bretagne – Londres voit une future Bulgarie forte et mieux émancipée de l’influence de son grand rival à l’Est – la Russie.

Le peloton de Goliamo konaré prête serment, 6 septembre 1885

Le coup cette fois-ci est porté par la Serbie. Son roi Milan, impopulaire dans son propre pays et poussé par l’Autriche-Hongrie, veut stabiliser sa position avec une guerre victorieuse et par la même occasion annexer certains territoires bulgares à l’ouest. Au début, l’armée bulgare peu nombreuse et inexpérimentée, sans aucun haut gradé dans ses rangs – tous les régiments et divisions étaient commandés par des jeunes capitaines et lieutenants, mais portée par un élan patriotique sans précédent, est soutenue sans réserve par toute la population.

Passage de la frontière serbo-bulgare, peintre Antoni Piotrovski

Et très vite l’Europe doit se rendre à l’évidence - la Bulgarie gagne la guerre au bout de deux semaines de combats /14-28 novembre 1885/. Cette victoire rend la Bulgarie populaire en Europe.

Suivent des négociations difficiles à l’issue desquelles les Grandes Puissances signent un accord avec la Sublime Porte /24 mars 1886/ qui règle les problèmes de la meilleure manière. Le prince bulgare demeure vassal du sultan, mais est nommé gouverneur général de la Roumélie Orientale, qui de fait n’existe plus.

Version française : Nina Kounova

Photos : militarymuseum.bg et archives


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