Par un sombre et pluvieux après-midi le 10 novembre 1989, le silence gagne Sofia. Les rues sont désertes, tout le monde est pressé de rentrer chez soi pour regarder la télévision ou pour appeler ses proches. Le thème récurrent est tellement surprenant que personne n’ose y croire. Todor Jivkov, secrétaire général du Comité central du Parti communiste, resté au pouvoir pendant 33 ans, considéré comme immuable, voire « immortel », a été écarté du pouvoir. C’est historique. Sans encore s’en rendre compte, les Bulgares font face à un cataclysme social qui changera leur monde de fond en comble.
C’est ainsi que la démocratisation a débuté, il y a 20 ans de cela. Aujourd’hui, les Bulgares sont libres de voyager et d’étudier où ils le désirent au sein de l’Union européenne, sans devoir faire la queue pour obtenir un visa aux ambassades et aux consulats étrangers.
Les étalages des magasins ne sont plus à moitié vides, comme ils l’étaient ; les médias jouissent d’une liberté auparavant méconnue, et tout le monde peut s’opposer au gouvernement tant qu’il le désire. Deux décennies après la chute du communisme, les Bulgares sont certes plus libres, mais sont-ils plus heureux ? Compte tenu des ambiguïtés, des crises économiques, de la corruption rampante, des promesses non-tenues des dirigeants politiques, il n’est pas évident de fournir une réponse à cette question.
Vingt ans, c’est un anniversaire, mais aussi de la matière à réfléchir, une occasion de dresser un bilan de la situation. Nous vous proposons un entretien avec nos confrères de Radio Bulgarie, dont les vies ont été marquées par les évènements du 10 novembre 1989.
« On se rendait bien compte que quelque chose était en train d’arriver, mais je n’aurais jamais imaginé que tout le système s’effondrerait comme un château de cartes », se rappelle Radoslav Dikov du Service Actualités. Comme la plupart des Bulgares, il n’oubliera jamais la session plénière du Comité central du parti, diffusée sur la télévision nationale. Radoslav se rappelle comment il s’est jeté sur le téléphone pour appeler ses amis et s’assurer qu’il n’était pas en train de rêver.
Ventsislav Nikolov du Service espagnol se trouvait à l’autre bout du monde. Il était à l’époque correspondant de la Radio nationale en Amérique latine. Au cours des semaines qui ont suivi la lutte intestine au sein du parti et les changements qu’elle a provoquée, la panique s’est emparée des employés des ambassades bulgares à l’étranger. Pour Ventsislav cependant, cela a ouvert de nouvelles opportunités professionnelles. La plus grandes chaîne de télévision hispanophone l’invite à devenir correspondant spécial à Sofia. « Cela était une période très intéressante du de vue de la créativité », se rappelle-t-il et ajoute :
« Je suis revenu en Bulgarie le jour où le quartier général du parti avait été incendié. J’ai tout de suite commencé à travailler. Parfois, on attendait de moi des rapports éclair sur les événements ; la situation était très dynamique en Bulgarie. J’ai réussi à m’entretenir avec des personnalités de premier plan sur la scène politique. Les gens avaient alors de très grandes attentes. Tout le monde a été déçu, parce que c’est la face cachée de la société qui a pris le dessus, elle s’est approprié le pouvoir économique. Nous avons perdu la stabilité, qui nous confortait ; on savait, avant, qu’on mangerait trois fois par jour. Tout le monde le savait sous le régime totalitaire. Il n’y avait pas de pauvreté absolue, il y avait une certaine sécurité. On a cependant obtenu quelque chose de très important : pouvoir dire ce que l’on veut, avoir d’autres espoirs et se faire des illusions que la situation allait s’améliorer, qu’on n’allait plus déraper, comme c’était le cas au temps du socialisme. »
Albéna Bezovska estime que les gens ne changement pas suite aux changements politiques. Cela est d’autant plus valable pour la génération qui a connu le régime totalitaire.
« Nous étions élevés de façon à accepter des compromis. En fait, on nous avait mis en tête que le compromis était la loi. Il fallait faire des compromis avec sa propre conscience. C’est pour cette raison que nous tous qui sommes nés pendant cette période sommes tordus, et maintenant nous cherchons à connaître notre vrai moi. Pour nous, les années 90 étaient aussi le temps de dire au revoir ; mes amis sont massivement partis à l’étranger. 20 ans après, je vois cependant qu’ils ont les mêmes problèmes que nous. Le quotidien est pareil pour tous. Pour moi, les choses n’ont pas tellement changé après toutes ces années. Je travaille beaucoup et je ne touche pas assez, il est difficile d’élever mes enfants. »
Anélia Tsonkova de Rédaction Politique intérieure affirme ne rien regretter, malgré les difficultés liées au changement.
« Je pense qu’il n’y a rien de plus important que la liberté que nous a apporté le changement. D’un autre côté, l’expérience nous a pris beaucoup de choses dont nous n’avions jamais entendu parler. Je dirais que les Bulgares sont maintenant plus matures et prêts à accueillir la vraie démocratie. Il ne nous reste plus qu’à la tourner à notre avantage, et non plus à celui des élites politiques et des groupements économiques qui ne sont pas dignes de confiance. Je suis convaincue que dans vingt ans, l’état des lieux sera encore plus positif. »
Version française: Damian Vodénitcharov
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