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Béni soit le vin, maudite soit l’ivresse!

Photo: archives
En ce 14 février, fête de Saint Tryphon, patron des vignerons, nous allons nous intéresser au thème du raisin et du vin traité par le folklore bulgare. Et il va sans dire que celui qui aime le vin, pousse facilement la chansonnette, grisé par cet élixir des Dieux qui nous porte et nous transporte au point d’oublier tous nos complexes et de faire voler en éclats tous les interdits.

Le raisin et le vin occupent une place privilégiée non seulement sur la table du Bulgare, mais aussi dans son univers spirituel. Dans les anciens manuscrits on retrouve la vigne et non pas la pomme, respectivement le pommier au jardin d’Eden, là où Adam et Eve ont goûté au fruit défendu. D’après une autre légende, Dieu seul aurait inventé le raisin et planté les premières vignes, alors que le Diable, essayant de le copier, fit pousser le mûrier. Ces deux fruits mûrissent au même moment de l’année, en automne, mais il faut consommer surtout du raisin, car les mûres qui piquent nous condamnent à fréquenter le Diable. Les contes pour enfants bulgares parlent souvent de raisin magique aux vertus miraculeuses qui transformerait les humains en ânes, et vice versa. Pas loin de Melnik, la plus petite ville de Bulgarie, dans la cour du monastère de Rojène, il se trouverait une vigne dont les grappes de raisins permettraient à de nombreuses femmes stériles de tomber enceinte et de mettre au monde un enfant.

La symbolique du raisin et sa transformation en vin sont marqués par une série de fêtes ou d’interdictions en rapport avec le cycle de sa transformation. Ainsi, il ne faut pas manger du raisin le 6 août, jour de la Transfiguration, en tous cas pas avant d’avoir fait bénir les grappes à l’église ; les vendanges commencent toujours le 14 septembre, fête de la Croix glorieuse. Quant au saint patron et protecteur du raisin, des vignes et du vin, c’est Saint Tryphon, lorsqu’on taille les vignes et arrose leur pied de vin rouge, histoire de les rendre plus robustes. Le saint Tryphon bulgare a très souvent les traits du dieu grec Dionysos, dieu de la vigne, du vin et de ses excès, fils de Zeus et qui a été adopté par les Romains sous le nom de Bacchus.


Le folklore bulgare présenter une attitude assez ambivalente à l’égard du vin. A preuve ce dicton qui dit : « Béni soit le vin, maudite soit l’ivresse ». Oui, le vin est considéré, d’une part, comme un des symboles du sang de Jésus Christ, qui suscite respect tout comme nous avons du respect pour le pain. Ainsi avant de porter le verre à ses lèvres, il faut se signer. Les jeunes mariés, eux aussi, franchissent le pas de leur maison et de leur nouvelle vie en arborant une gourde de vin, gage de leur amour et de leur bonne entente. Mais d’un autre côté, quand le vin nous monte à la tête, il nous transforme en bourrique, nous perdons nos moyens et nous sombrons dans un monde parallèle qui nous fait faire des bêtises, voir pire ! Bref, la nature contradictoire du vin nous est sans cesse rappelée. Et il semble que cette dualité date de l’époque de Noé qui aurait planté sa vigne dans un champ, en l’arrosant du sang de trois animaux, l’agneau, le lion et le cochon. Quel est le message qu’il voulait nous faire passer ? Il est tout simple : quand on boit un peu on devient doux et tendre comme un agneau, si l’on boit un peu plus, on se transforme en lion menaçant et rugissant qui s’acharne sur le monde entier. Enfin si l’on boit énormément, comme un porc justement, on est condamné à se vautrer dans la boue et à devenir la risée de ses semblables et du monde entier. Jolie morale, vous ne trouvez pas ?

Disons pour conclure que dans le folklore bulgare boire du vin est le monopole des hommes, surtout quand ils sont jeunes et robustes et qu’ils se préparent à entrer en combat. Il arrive aussi que la rivalité entre deux héros se décide à la faveur d’un concours de boisson, un véritable test d’endurance où le plus fort et le plus méritant arrive à engloutir sans s’effondrer 3 barriques de vin, qu’il accompagne de 3 fournées de pain et de toute une vache rôtie.

Sinon, le raisin et les vignes sont considérés comme des symboles de beauté et de fertilité. Un grand nombre de localités bulgares portent des noms dérivés du vin – Vinarsko, Vinarovo, Vinograd, Vinitza…

Présenté par Sonia Vasséva




По публикацията работи: Vihra Baéva


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