Le 10 février, l’Eglise orthodoxe bulgare rend hommage à Saint Charalampe de Magnésie, prêtre d’Asie mineure et martyr au début du IIIe siècle. Depuis la nuit des temps, il est considéré comme le saint protecteur des apiculteurs, qui marquent en cette journée leur fête professionnelle. Tous les fidèles affluent à l’église avec un pot de miel que le prêtre bénit. Le même rituel est répété en juillet à la Saint Procope que nos anciens surnommaient le maître des abeilles.
« Jeune demoiselle butinait d’une fleur à l’autre en chantant, et à peine rentrée à la maison, elle préparait un savoureux repas »…Elles sont nombreuses les devinettes sur le monde des abeilles qui sont également très présentes dans le folklore bulgare, surtout les chants du printemps. Les jeunes filles sont souvent comparées à des abeilles travailleuses, dévouées mais aussi fertiles…Certaines légendes expliquent comment cette « bestiole bénie de Dieu » a été récompensée par le ciel, qui en a fait une guérisseuse hors-pair.
Il fut un temps où l’abeille rendit un grand service à Dieu, mais n’en sortit pas indemne. Pour récompenser ses efforts, il la bénit. D’après une légende, Dieu décida de se marier avec le Soleil et convia à ses noces tous les êtres vivants. Seul le Diable ne fut pas invité, ce qui le mit en colère et il partit demander des explications au Seigneur qui, de son côté, envoya son messager, une abeille, pour entendre ce que le Diable déblatérait sur son compte.
Et voici ce que l’abeille entendit de la bouche du Diable : « Stupide celui qui décide de se lier au Soleil. Car si un seul soleil réussit l’été à mettre tout en feu et en flammes, qu’adviendra-t-il quand il aura fait des petits ? » Et alors que l’abeille s’apprêtait à repartir, le diable l’aperçut et la prit en chasse. Une de ses flèches blessa l’abeille qui réussit quand même à se traîner jusqu’à la maison de Dieu pour lui rapporter ce qu’elle avait entendu. Et c’est ainsi que son dévouement et son sacrifice lui valurent respect et considération. Cette légende nous est rapportée par l’ethnographe Dimitar Marinov qui a collecté toute la sagesse de nos anciens dans les villages autour de Sofia, Botevgrad, Montana et Svichtov.
D’après une autre légende, lorsque Dieu et le Diable se sont affrontés violemment, chacun prétendant être le créateur de la terre, du ciel et du monde animal, l’abeille fut de nouveau choisie comme émissaire secret pour percer les desseins du Diable qui entendait concevoir la terre plus petite que le ciel dont il la recouvrirait pour protéger les humains et les animaux. La fin de l’histoire reste toujours la même, l’abeille dévouée fut blessée, mais cela n’empêcha pas qu’elle soit récompensée de Dieu en tant que symbole du bien.
„Rien de plus doux que le miel et l’amour partagé “ dit un adage bulgare qui revient souvent dans les chants traditionnels.
Et c’est vrai que le miel est incontournable dans les rituels accompagnant les fiançailles et les mariages. Le jour du mariage on enduit de miel la porte d’entrée de la maison par laquelle passera la jeune mariée. Le miel trône sur la table du festin du réveillon de Noël ou de l’Epiphanie. Le miel est aussi utilisé comme antidote, pour éloigner certaines maladies, notamment les oreillons ou la peste. Toutes les cérémonies bulgares se déroulent en présence d’une belle miche de pain et d’un pot de miel. Le miel entre aussi dans la composition de nombreuses préparations de la médecine douce, comme d’ailleurs plus récemment dans les soins de beauté…
Version française : Sonia Vasséva
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