L’engrain ou petit épeautre est une des premières céréales domestiquées par l’homme au Moyen orient, vers -7500 avant Jésus-Christ. En Bulgarie, les plus âgés se souviennent encore du temps où ils en fessaient du pain. Les archéologues en ont trouvé des traces dans les sites datant des Thraces, tout comme il y en a dans les tombeaux égyptiens. En Europe, après la Seconde guerre mondiale apparaissent des mélanges d’épautre avec d’autres céréales, mais au fil du temps le blé finit par s’imposer. Avec la consommation de masse, les sortes de blés ont été améliorées, pour obtenir plus de rendement, alors que l’épaufre ne subit aucune modification génétique et garde les mêmes qualités qu’il y a 1000 ans. C’est pourquoi, il demeure une céréale à faible rendement. En revanche, il peut être cultivé sans l’usage d’engrais chimiques.

Aujourd’hui, le pain d’épeautre revient en force sur les tables des Bulgares et ils en raffolent. Ses qualités nutritives sont très attractives. Mais ce n’est pas que les boulangers et les pâtissiers qui s’y intéressent, l’épeautre trouve aussi sa place dans la production de bière.

Le potentiel de l’engrain dans la brasserie fait l’objet d’une recherche collective sur le transfert des innovations entre la Bulgarie, la Tchéquie et l’Allemagne. L’objectif est de diffuser cet ingrédient dans l’industrie agro-alimentaire.

Le professeur Valentin Batchvarov de l’Académie des sciences agraires est un des partenaires du projet. Pour lui « la production de bière à base d’engrain est une vrai challenge, car il faut arriver à un juste équilibre entre le maltage d’engrain et le maltage d’orge ».

Grace aux essais en laboratoire en Bulgarie et en Tchéquie, il a été constaté que la meilleure proportion est de 50/50. En Tchéquie, on applique la méthode de fermentation haute des levures, alors qu’en Bulgarie, les chercheurs ont élaboré une technologie de fermentations basse, c’est-à-dire à basse température. C’est ce qu’on appelle la bière Lager est cela peut être un avantage sur le marché. 

« L’épeautre pose certaines difficultés sur le plan technologique, que nous devions surmonter. C’est une céréale, mais plus petite que l’orge, ce qui complique le processus de maltage, car les machines ne sont pas adaptées. Un autre problème c’est la faible teneur en gluten de l’épeautre, ce qui rend difficile la production de pain avec de la levure.

Cette difficulté a été surmontée grâce à des technologies qui permettent de réduire la quantité d’eau pour le mélange, pour augmenter les propriétés du peu du gluten contenu dans l’engrain. En revanche, l’avantage de cette céréale c’est que c’est une culture biologique, ne subit pas de traitements chimiques. Elle peut pousser sur des terres arides et n’est pas exigeante. La céréale est riche en protéines et contient beaucoup de magnésium et du souffre. L’épeautre cultivé en Bulgarie contient beaucoup de zinc, un élément très important pour notre organisme ».

Selon les chercheurs participant au projet, la bière à basse d’engrain pourrait être produite dans des petites brasseries et faire son entrée dans l’industrie. Selon le professeur Batchvarov, le prix de cette bière dépendra du volume de la production et de la demande du marché. Pour le moment, l’épeautre n’est pas largement cultivé en Bulgarie et la production n’est pas très bien organisée. Il s’agit de petits producteurs, qui ne sont pas certifiés et qui importent les semences de l’étranger.

Version française : Miladina Monova