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Ivaylo Dimanov : „Je nourris un espoir profond, que devant le Bien même la mort va céder”

Photo: BGNES

A l’occasion de la Semaine mondiale de la poésie nous allons vous faire rencontrer Ivaylo Dimanov – journaliste, poète et écrivain. Il est un des bardes les plus connus – ces poètes à la guitare, comme on les appelait, ou encore ces romantiques en voie de disparition. A l’occasion de son 60e anniversaire Ivaylo Dimanov a donné un récital et a présenté son nouveau livre « Le Biangle des Bermudes ». Une bonne partie des chansons qu’il a interprétées sur le plateau de la salle 5 au Palais national de la Culture font partie de son album „A la tienne, Solitude”.


Personne
n'est plus grand
que les rêves du mendiant...
Je vous prie -
ne poussez pas du pied
cette boite de conserve.
Là dedans
je recueille les miettes
de votre générosité.

„La poésie est un médicament très efficace contre le négatif de la vie, du moins en ce qui me concerne  – dit le poète.-  A la première de mon nouveau recueil de poésie « Le Biangle des Bermudes » le public était venu nombreux. La salle était pleine à craquer d’amoureux de la poésie. De toute évidence d’autres que moi recourent au même „ médicament“. Comment je m’y prends pour écrire mes chansons? Tout d’abord je tiens à faire une petite précision : chez moi il s’agit de poésie qui est d’abord chantée. Je commence par écrire les poèmes et par la suite, si le bon Dieu le veut, je « rattache » à mes strophes de la belle musique, ce dont je lui suis infiniment reconnaissant. Dans le passé il y avait des forums auxquels nous autres, les poètes à la guitare, nous présentions nos œuvres. Malheureusement, bon nombre de mes amis, qui faisaient partie de ce genre d’expression artistique ne sont plus. Je ne vous apprends rien en vous disant que la musique commerciale règne. Il y a très longtemps de cela, dans les années 60 et 70 du siècle dernier, on se réunissait et l’on chantait sous les étoiles. Il reviendra peut-être le temps où notre musique résonnera mais dans les squares de quartier seulement. Je ne suis guère optimiste, vu que  l’industrie a pris le devant de la scène et on ne peut plus l’en déloger. J’ai gravé mes albums au cours des deux dernières années. J’avais été invité à un festival de la culture bulgare au Canada. Les organisateurs m’avaient demandé d’emmener avec moi non seulement des recueils de mes poésies, mais aussi des albums de mes chansons. Mes rencontres avec la communauté bulgare ont été particulièrement émouvantes. Depuis je ne cesse de voyager et de présenter mes poèmes chantés. Aux Etats-Unis j’ai eu quelques récitals très bien accueillis. J’ai chanté aussi devant un public averti à Vienne, à Bruxelles je me suis trouvé juste au moment des attaques terroristes. Tous les événements artistiques avaient été annulés, la ville était sous le stress et pourtant la salle était bondée, c’était inoubliable.”

Voilà que bientôt s'ouvrira
cet abime vert…
Je me vois forcé au combat,
mais hyène, je ne le suis guère.
Je chante pour moi seul et je suis
le fou de la plage.
Je suis votre garde de nuit,
les amoureux du rivage.
Je suis la mouette rieuse
qui vous inquiète.
Je suis une personne affreuse,
je suis Judas – en fait.
Je suis votre foi fougueuse
dans le drapeau et l’amour.
Je suis la guitare poussiéreuse
appuyée au mur.
Je suis le mauvais esprit enfermé
et jeté dans l’océan.
Je suis médaille et gibet,
je suis Dieu et Satan.
Voilà que bientôt s'ouvrira
cette étendue sans fin.
Je ne sais pas qui je suis, moi.
Je ne sais vraiment rien.

„ Chaque poème a son histoire – poursuit le poète. Et lorsqu’il s’accompagne d’une belle mélodie, alors, plus rien ne peut l’arrêter, rien ne peut se mettre en travers de sa route. Il franchit allègrement les frontières et vogue dans l’espace. Les possibilités offertes par les nouvelles technologies sont énormes. Désormais il еst impossible d’enfermer la belle poésie dans le cadre du quartier qui l’a vu naître. Selon moi, lе plus précieux ce sont les contacts entre les gens, la communication. C’est ce que je vois à chacun de mes déplacements à l’étranger. Je chante devant des compatriotes mais aussi devant des gens qui ne connaissent pas un mot de bulgare, mais qui sont ouverts à notre culture. D’habitude je me présente avec des traductions dans la langue du pays dans lequel je me trouve.  A Paris, mes poèmes ont été dits par une actrice pleine de talent – Iva Déléva ; à Londres, parallèlement avec les poèmes chantés en bulgare le public écoutait la traduction en anglais. En 2010, j’ai été récompensé par le Prix international de littérature à Turin, en Italie. Mon plus grand rêve était exaucé, visiter le pays de la musique et du cinéma que j’aime le plus au monde. J’y suis allé avec la guitare, évidemment. J’ai donné un récital improvisé dans une merveilleuse salle et je me suis fait de nouveaux amis. Mes poèmes sont traduits en anglais, et en français, mais aussi en russe, tchèque, allemand et en turc. Pour moi il est très important que la littérature bulgare soit lue et connue à travers le monde. Il y a des cas, où des gens qui ne connaissent pas un mot de bulgare et qui, pourtant s’intéressent à mes chansons. Aux Etats-Unis un afro-américain a acheté mon album. Je lui ai demandé s’il connaissait le bulgare, il m’a répondu qu’il ne comprenait rien, mais qu’il avait beaucoup aimé mes chansons. L’essentiel c’est de mettre ne serait qu’une parcelle de son âme dans tout ce qu’on fait et que l’on crée pour que l’autre puisse le ressentir et le faire sien.“

A mon père

Les bonnes gens s’en vont d’ici très tôt.
Pour le banquet seuls restent les méchants.
La vie c’est un tirage à gros lots,
mais quel sera le numéro gagnant?
Les bonnes gens préfèrent la solitude,
et les méchants – les moeurs des moutons.
Et l’homme, à contrecoeur, prend l’habitude
à dire “oui“ au lieu de dire “non“.
Les bonnes gens souffrent de névrose
et les méchants – ils ont les nerfs de fer.
Hamlet résolut la question, et pour cause:
Il faut faire mal avant d’avoir souffert.
Les bons périssent les premiers dans la lutte
et les méchants crient “Hourra!” derrière eux.
Botev* n’attendait pas, sans aucun doute,
du peuple quelque chose d’avantageux.
Les bons ne chantent que de tristes airs
et les méchants – de solennels dithyrambes.
La vie est merveilleuse, mais austère,
quand on ne compte pas sur un garant.
Les bonnes gens ont foi dans le Bien
et c’est la chance que les méchants guettent.
Mais pour vainere le mal je vous préviens
qu’il ne souffira pas d’être poète.
Souvent on dit que les bons disparaitront
crucifiés par leur propre bonté.
Et moi je nourris un espoir profond
que devant le Bien même la mort va céder.
---
Christo Botev*- grand poète et révolutionnaire bulgare

Version française Roumiana Markova



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