Jusqu’au 6 octobre, à l‘Institut culturel tchèque de Sofia, le public peut admirer les photos bouleversantes du photographe Stoyan Nénov, qui fait partie de l’équipe de photographes de l’agence Reuters. Il est le premier Bulgare récompensé par le prestigieux prix Pulitzer, prix qu’il partage avec ses collègues de l’équipe de photographes de l’agence et avec des photographes du New York Times dans la catégorie « Actualités en direct » et qui montrent le drame des centaines de milliers de migrants sur leur chemin vers le Vieux Continent.

Le cliché  qui lui a apporté le prix, Stoyan Nénov l’a pris l’année dernière en Macédoine. On y voit un jeune homme qui tente de monter par la fenêtre dans un train super-bondé.

Je n’ai pas cherché à montrer précisément cet homme, parce que c’était une chose qu’on voyait absolument sur tous les trains en partance de la gare de Guévguélia en direction de la frontière serbe. En réalité, ils étaient des centaines les gens qui prenaient d‘assaut les quelques trains pour la journée. On y avait envoyé cinq ou six gendarmes macédoniens  qui  essayaient par tous les moyens de maintenir un ordre impossible à maintenir. Je n’ai eu donc aucune difficulté à photographier cet homme, cela se passait sous les yeux de nous tous, de la foule amassée alentour et à chaque départ de train.

A ses débuts Stoyan Nénov travaille pour le journal "Demokrazia", puis il fait des photos pour les journaux "Balgarska Armia" et "Standart". Il intègre l’équipe de Reutersen 2003. Il dit que les sujets et les thèmes sont les mêmes pour tous ses collègues photographes de l’agence : politique, social, photos du jour, sport, météo, la palette est riche. Et il ajoute que les photos protocolaires ne sont pas parmi les préférées de ses pairs mais qu’elles ont elles aussi leur place. „ Je me plie aux normes et aux règles établies. Les photos doivent couvrir toutes les sphères pour les besoins de milliers de médias et abonnés de l’agence.” 

L’exposition est intitulée „1/320 de seconde”. C’est la vitesse d’obturation optimale qui assure pratiquement à 90% la meilleure prise de vue d’une personne en mouvement et ce qui est le cas de la photo récompensée de notre compatriote. "Les gens en mouvement" est aussi le grand sujet de l’exposition de Stoyan Nénov.

„Vous m’avez dit que vous ne voulez pas reprendre vos photos”, ai-je demandé à Stoyan Nénov. J’ai compris que ce sont d’ailleurs les standards imposés par l’agence.

Les photos doivent être infiniment honnêtes envers le public, elles doivent être le reflet réel de la situation telle qu’elle est. Autre élément d’importance: la vitesse à laquelle nous travaillons ; elle permet, depuis l’instant où on appuie sur le bouton de faire parvenir la photo à l’abonné de l’agence dans deux-trois minutes au plus.

L’exposition fait partie du festival Fotofabrika – nous dit Emi Barouh, la directrice. C’est Felia Baruh, la commissaire de l’exposition qui en a eu l’idée, elle-même ayant pris part à des forums prestigieux montrant au public des œuvres exemplaires de l’art de la photo. Elle a rassemblé autour de l’idée une équipe de fidèles auxquels nous devons cet excellent résultat.

C’est comme ça que nous avons lancé ces festivals, au début il y a eu le premier qui a été suivi par le deuxième, puis par le troisième festival. Aux deux premiers nous avons réuni beaucoup de photographes connus et de collections importantes. Ils nous ont aidés aussi sur un plan purement financier, ils ont compris combien ce festival nous tenait à cœur et ils ont pour ainsi dire offert au public leurs œuvres exceptionnelles sans que nous ayons rien à payer pour cette participation pro bono.

Lors de la première édition par exemple, « Alcobendas », une des plus riches collections de photos en Espagne était venue avec quelque 90 de ses œuvres primées et d’une très grande valeur, sans nous demander de frais de location.

„ Cette année aussi à l’instar des deux années précédentes nous présentons deux grands volets. L’un présente des expositions à la Galerie nationale, le deuxième présente des expositions en plein air. Ces dernières montrent des photos provenant des collections des plus grandes agences de photographie :Reuters, Getty Images, France-Presse, DPA, pour la première année. Là encore nous n’avons rien payé, on nous les prêtées, nous avons reçu l’autorisation de montrer une sélection à laquelle nous avions collaboré. Cette année, le public de Sofia et d’ailleurs pourra admirer les photos sur le Pont des Amoureux, mais nous avons « emménagé » aussi à l’Ecole de Musique et dans deux autres écoles de Sofia où seront arrangées les meilleures photos de Reuters, Getty Images, le festival étant ciblé sur le thème des „Conflits”.

Et où seront gardées les photos de l’exposition de Stoyan Nénov?

„Elles seront intégrées à la collection naissante, au fonds de Fotofabrika. Nous essayons aussi de faire quelque chose qui est très important à mes yeux – faire sortir le festival de Sofia, vu que la capitale a déjà suffisamment d’événements culturels, de pôles d’attraction. Nous apprécions énormément l’appui de la Municipalité de Sofia, mais il me semble que la capitale peut s’inviter dans les autres villes du pays. L’année dernière nous sommes allés à Gabrovo et j’ai été fortement impressionnée par l’accueil chaleureux des gens de la ville et de la région. Nous envisageons de montrer des extraits du festival dans d’autres endroits de Bulgarie et nous avons déjà été invités à le faire.

Version française Roumiana Markova