La Bulgarie a connu une résistance armée au régime communiste, qui prend de l’envergure dès 1944 et atteint son apogée en 1952-1953. Ainsi, nous apprenons qu’une insurrection a eu lieu avant celle en Hongrie (1956) et le Printemps de Prague. Il s’agit de ceux qu’on appelle les Goriani, des paysans maquisards affiliés au parti agrarien et à l’aile de Nikola Petkov qui n’a pas voulu entrer en coalition avec les communistes. C’est une histoire que l’on connait peu et qu’on ne retrouve pas dans les manuels d’histoire. Or, les archives se mettent à parler et nous savons déjà que cette guérilla a été bien plus importante qu’on ne le croyait.
Guérassim Todorov a été commandant du 6e bataillon déployé dans la montagne Pirin. De là, il écrit une lettre adressée au communistes du village de Vlahi, dans laquelle il met en garde « le peuple qui ne doit pas tolérer les assassinats, les pillages et les abus des Rouges ». En 1947 il crée un mouvement clandestin en Macédoine du Pirin qui mène des actions contre la campagne de « macédonisation » dans la région, lancée par le Parti communiste, suivant un accord entre Tito et Dimitrov. Entre 1944 et 1955 la guérilla des Goriani prend de l’ampleur et environ 600 bataillons de montagne se dissimulent dans les forêts (gora) d’où leur nom Goriani.
Atanas Kiriakov est l’auteur de l’unique documentaire au sujet de ce mouvement organisé anti-communiste.
« C’était surtout des paysans expropriés. Ce fut un des plus grands crimes du communisme qui a privé les paysans de leur terre. De la littérature nous savons à quel point la terre était importante, des frères s’entretuaient pour un lopin de terre, des familles la vendaient pour envoyer leurs enfants faire des études.
Les clandestins planqués dans la montagne recevaient l’aide des villageois, qui les nourrissaient et les hébergeaient ».
Le pouvoir communiste les persécute et craints à la fois. A Sliven, pour affronter un détachement de 80 personnes, les autorités envoient une armée de 30 000 soldats.
« Les archives témoignent de la peur et de la panique du pouvoir face à ce mouvement armé. La propagande essaye de discréditer les résistants et change sans cesse ses méthodes de combat pour liquider le mouvement. Les documents que nous avons consultés donnent froid dans le dos, les témoignages des Goriani qui ont survécu sont effrayants. C’est tout le système qui était bâti sur la peur. »
L’histoire se termine mal, la plus part des Goriani ont été liquidés soit lors des combats, soit dans les prisons. Le mouvement est aussi corrompu de l’intérieur par des infiltrations et trahisons. L’aide de l’Ouest tant attendue ne vient pas.
Aujourd’hui la réhabilitation et la reconnaissance nationale sont enfin à l’ordre du jour. Le Président Rossen Plevnéliev va décorer à titre posthume 30 commandants des Goriani. Mais cela suffira-t-il pour que justice leur soit faite ? Nous avons posé la question à Nikolay Pankov, dont le père était aidait les Goriani près de Sliven.
« C’est une très belle initiative, mais hélas personne ne connait les noms des victimes, ni où se trouvent leurs tombes. Les descendants des Goriani continuent de garder le silence et beaucoup ont emporté leurs secrets dans leur tombe, comme mon père. Je serais très heureux si on reparlait de l’épopée des Goriani avec des faits historiques fiables, avec respect pour ceux qui ont pris les armes pour défendre leur pays et leurs familles. Le communisme n’a pardonné à personne et nous avons un devoir de mémoire envers les Goriani qui ont été les premiers à s’organiser dans un mouvement armé, avant les Hongrois et les Tchèques ».
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