Dix ans après son entrée dans l’Union européenne la Bulgarie reste le pays le plus pauvre avec un SMIC de 235 euros. Pour quelles raisons la Bulgarie est constamment en retard par rapport à d’autres pays post-communistes, comme par exemple la Roumanie où le SMIC est 319 euros et la Lituanie (470 euros) ? Dans son analyse, l’économiste Kiril Petkov se réfère à l’index mondial de la corruption et arrive à la conclusion que ces dix dernières années ce phénomène a pris une grande ampleur. Selon lui, si la corruption avait été ramenée au niveau de celle en Slovénie, les Bulgares auraient été 50% plus riches. L’influence désastreuse de la corruption ne provient pas uniquement des détournements et abus de fonds publics, mais elle signifie aussi des opportunités ratées, explique l’expert formé à Harvard et mentionne l’occasion ratée de l’impôt à taux unique de 10%.

Des affaires de corruption colossales comme le cas de la CorpBank et encore plusieurs de ce genres repoussent les investisseurs à prendre le risque, ajoute l’expert.

Il est incroyable comment nous avons perdu 2 milliards d’euros à cause de l’affaire de la CorpBank. La banque cache le secret de 60 crédits et cela pose plusieurs questions – qui sont ces individus, pourquoi personne encore n’a été condamné par la justice, pourquoi le directeur exécutif se trouve en Serbie? Il faudrait aussi mentionner un autre exemple au niveau des monopoles et des cartels des distributeurs de carburants. En 2015 “Lukoil” annonçait des recettes de 2.5 milliards d’euros par l’intermédiaire de“Neftochim” et enregistre des pertes de 60 millions d’euros. Comment est-il possible d’encaisser des pertes avec une telle marge des bénéfices. Il existe encore une autre question – les appels d’offres publiques en matière d’infrastructure sont-elles les plus avantageuses pour nous?

Kiril Petkov estime que la solution de cette série de problèmes relève des compétences du pouvoir exécutif. S’il a la volonté de modifier l’état tragique des choses, il pourrait commencer par inspecter les fraudes de TVA et des revenus gris. Mais à cette fin il faudrait nommer une personnalité irréprochable à la tête de l’Agence nationale des revenus. Cette personne doit avoir le courage d’affronter les grands payeurs, qui doivent contribuer au trésor public. Selon l’expert, si nous continuons ainsi, rien de bon ne nous attend.

Depuis 2011, nous avons doublé la dette publique et si nous continuons à le faire tous les cinq ans, nous nous retrouveront dans une spirale de la dette – assure Kiril Petkov. C’est pour cela que nous devons dire « ça suffit » à la corruption dans toutes ses formes et déclinaisons, nous concentrer sur les exportations compétitives et ne pas compter sur des emprunts internationaux et les Fonds européens qui seront progressivement réduits. Chaque Bulgare a pour devoir de se rendre compte que la stabilité économique est disparue – soit on change le modèle et nous progressons, soit nous sombrons et nous nous rapprochons du scénario grec.

Version française : Vladimir Sabev