Tôt le matin de la Saint Georges, les amoureux de la nature et des sensations romantiques entreprendront un voyage dans le temps, au plus près des forêts et de l’âme humaine. Pour ce faire, ils emprunteront le funiculaire qui part de la gare Septemvri, dans les replis de la montagne Rila, pour déboucher sur les près fleuris de Yakorouda, dans le Rhodope, là où ils seront les hôtes d’un pique-nique géant qui donne déjà l’eau à la bouche… 

Ce joyeux festin est organisé pour la deuxième année consécutive par l’Association du « Funiculaire », qui espère en faire une tradition. Nous avons rencontré un de ses membres, Christian Vaklinov, qui nous décrit l'ambiance de cette jolie fête : 

Très peu de gens ont entendu parler de Yakorouda et s’ils en savent quelque chose, c’est qu’il s’agit d’un village peuplé de Bulgares musulmans. Mais ce n’est pas tout ! Yakorouda a une très riche histoire, qui remonte à l’époque des Thraces, c’est aussi une terre de chrétiens, qui cohabitent de nos jours encore dans la bonne entente avec des musulmans. Ce qui est intéressant à signaler, c’est qu’à l’occasion de la Saint Georges qui est aussi la fête de Yakorouda,  tout le monde se réunit à l’église « Saint Georges » qui est une des plus anciennes du pays et un grand festin est organisé pour toutes les familles, qu’elles soient chrétiennes ou musulmanes.  Et ce brassage des cultures et des religions, nous en sommes fiers, tout comme de cet esprit de partage qui anime tous les habitants de la petite ville.

Arrivés sur place, les touristes sont toujours très curieux de savoir comment vit cette population de montagnards…

Il ne faut pas oublier que nous sommes au cœur du massif des Rhodopes, où l’on trouve des hameaux et des petits villages de plusieurs dizaines d’habitants à peine, poursuit son récit Christian Vaklinov. Mais encore une fois, tout ce petit monde vit dans la bonne entente et l’entre-aide, même pendant les durs mois d’hiver quand les coupures d’électricité sont fréquentes à cause de la neige et qu'il n’y a que le petit train qui relie les habitants au reste du monde. Et croyez-moi, à ces moments-là, on oublie qu’on est au XXIe siècle. Le commerce de troc fleurit et les femmes parcourent des kilomètres pour vendre le lait de leurs vaches. Et même si les habitants des Rhodopes sont citoyens de la Bulgarie et de l’Union européenne, le fossé qui sépare les uns des autres est énorme…

Christian Vaklinov se souvient avec émotion de la grande kermesse populaire de l’année dernière, avec le joyeux festin près de la rivière Yakorouchtitza, et les chants et les danses qui ont fait battre le cœur des habitants et des visiteurs de la petite ville. Certains sont même repartis la larme à l’œil avec la promesse de revenir …

Les habitants de Yakorouda accueillent les touristes dès leur entrée en gare en organisant une petite cérémonie très sympathique. Même si c’est un jour de pluie, personne ne reste sans abri. C’est le cœur et la fameuse hospitalité bulgare qui parlent. Et si les gens vivent de plus en plus seuls dans les grandes villes et fuient leur prochain, à Yakourouda c’est tout l’inverse. Et chaque arrivant est traité comme un prince…

Ainsi, lorsque le 3 mars dernier, 200 personnes sont descendues à la gare de Yakorouda du train, un des habitants les plus âgés de la ville a fondu en larmes, car c’est pour la première fois qu’il voyait autant de monde descendre du train. En effet, c’est le mot magique « communion » qui caractérise le mieux la vie à Yakourouda, nous assure avec fierté Christian Vaklinov. Et gare aux politiques qui brandissent la carte nationaliste, plutôt que d’encourager ces relations fondées sur les échanges chaleureux du  cœur.