A une des premières réunions du Conseil de l’Europe - l’Organisation intergouvernementale instituée le 5 mai 1949 par le traité de Londres - l’émigré politique Guéorgui Mihov Dimitrov, alias Guéméto exige qu’on laisse vides les sièges pour les représentants des pays du bloc de l’Est, en attendant le jour de leur adhésion. Le leader des agrariens bulgares est un proeuropéen convaincu depuis le tout début du mouvement pour une Europe unie. Mieux encore, il croit fermement que cette région du vieux continent sera libre et démocratique. Ce rappel est assez symbolique parce que l’Agence bulgare, dépositaire du passé marque la Journée internationale des archives avec deux événements significatifs – elle accueille les archives d’un des premiers Bulgares, à promouvoir l’idée de la création de l’UE et fait paraître l’album La Bulgarie et l’Europe, en témoignage de nos relations séculaires avec les peuples européens.
Les archives de G.M.Dimitrov nous font revenir à ses années d’exil. Depuis Washington il dirige le Comité national bulgare, une association d’émigrés, qui œuvre pour la démocratisation de son pays et fustige les cruautés perpétrées par le régime communiste. En 1951, il forme la première unité bulgare intégrée dans les effectifs de l’OTAN, en Allemagne de l’Ouest.
« Mon père était un homme remarquable, dévoué corps et âme à la Bulgarie – il donnait tout, s’investissait à fond pour aider le journal et l’organisation qu’il avait créés en exil et jusqu’à son dernier souffle n’a cessé d’œuvrer au nom de notre libération du régime communiste – dit sa fille Anastasia Moser, qui a fait don de ses archives personnelles. – Il siège à l’Assemblée nationale de 1931 à 1934, lorsque le roi Boris III interdit les partis politiques. En 1941 il est contraint de s’exiler, parce que ordre du monarque la police s’apprête à arrêter les chefs de l’opposition dont G.M. Dimitrov. Et il se choisit pour tribune la station de radio la Bulgarie Libre et Indépendante pour exhorter le peuple bulgare à la résistance et l’informer de la situation dans le pays, devenu l’allié du Troisième Reich. Revenu au pays en 1944, il est chaleureusement accueilli, mais peu après les communistes lui mènent la vie dure et le placent en résidence surveillée. Le 23 mai 1945, il se réfugie à l’ambassade des Etats-Unis, accueilli par le diplomate Maynard Barnes et s’installe par la suite Outre-Atlantique. Jusqu’à son dernier jour, il quitte ce monde en 1972, G. M. Dimitrov démasque inlassablement le régime communiste, croyant dur comme fer que la démocratie finira par l’emporter dans sa patrie, où cassés par le désespoir les gens avaient été contraints et forcés de s’adapter au nouveau pouvoir. »
Désormais le régime totalitaire, sombre épisode d’une cinquantaine d’années et, qui avait arraché la Bulgarie à son milieu naturel, la famille des peuples européens libres fait partie de l’histoire. Pourtant les relations durables de notre pays avec les peuples européens sont illustrées dans l’album la Bulgarie et l’Europe. Avec ses schémas, photos, documents, et cartes à l’appui, il présente au public des événements et des personnalités, impliqués dans le dialogue culturel, politique et économique.
Et puisque nous parlons d’événements, qui ont marqué la Journée internationale des archives, c’est le moment de nous poser la question, si nous sommes suffisamment motivés pour mieux connaître le passé et décrypter les faits historiques afin de ne pas le répéter ?
« L’intérêt pour les documents d’archives est considérable, mais je voudrais qu’il soit encore plus grand – dit Mihaïl Grouev, le chef des Archives nationales. – J’invite les chercheurs, les journalistes et tous les esprits curieux à nous rendre visite plus souvent. Certainement, les politiques n’ont pas le temps de fouiller dans ces documents et ces sources, mais ils gagneraient à lire davantage et tirer des enseignements de l’histoire, parce qu’elle puise ses racines aux archives. Nous faisons toujours la même erreur, nous ne tirons pas des leçons du passé. C’est ce qui explique pourquoi nous basculons dans les extrêmes – nationalisme et radicalisme, russophiles et ottomanophilie, au dépens de la voie de développement à suivre sans nous en écarter. »
Version française : Roumiana Markova
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