Comment vivaient les hommes à l’aube du néolithique et comment voyaient-ils le monde ? Le centre qui ouvrira en 2019 ses portes à Sofia aux amateurs d’histoire est aménagé sur les vestiges du village de Slatina datant du néolithique ancien. Connu depuis 1958, il faut attendre néanmoins 27 ans pour charger une équipe d’archéologues de lancer des fouilles sous la direction de Vassil Nikolov. Abandonnées peu après, les fouilles reprennent en 2013 et se poursuivent à ce jour. Le bilan des archéologues :
„Le village Slatina appartient à un des peuplements les plus anciens d’agriculteurs et d’éleveurs d’Europe. Partis d’Asie Mineure à la fin du 7e et au début du 6e millénaire av.n.è. ils s’installent dans le Sud-Est européen – les Balkans de l’Est, la Thessalie et le Centre des Balkans. La datation est établie grâce au radiocarbone avec un écart de 5 ans +/-“, - précise le prof. Vassil Nikolov :
„Le site couvrait près de 3 ha et il était habité sur une période de plus de 500 ans. Nos ancêtres déménageaient en divers endroits de ce territoire, leurs habitations en bois et argile n’étant pas des plus solides, elles se désagrégeaient au bout d’une soixantaine d’années. A leur emplacement même ou à proximité on faisait bâtir la nouvelle habitation à l’instar de la succession des générations des humains. “
En 1985, une habitation aux dimensions impressionnantes - d’une superficie de 117 m carrés est mise au jour et fait l’objet d’une étude détaillée. Plus tard les archéologues tombent sur une demeure encore plus grande - de 147 m carrés. Actuellement l’équipe étudie une habitation dont la superficie est estimée à quelque 300 m carrés.
„Dans ces habitations il y avait plusieurs pièces, - poursuit Vassil Nikolov. – Dans chacune d’elle on trouve en règle générale un four en forme de dôme qui servait à se chauffer et à préparer la nourriture.
Il y avait aussi des silos à grain, des meules de pierre pour le moudre, un métier à tisser, des couchettes rudimentaires et autres outils. Les plus grandes habitations comportaient également un foyer. Tous les biens de la famille s’y trouvaient, le bétail était parqué hors du village. Les maisons étaient suffisamment solides – en torchis à ossature de chêne, enduites d’un crépi d’argile avec des ouvertures servant de fenêtres et de portes et un toit à double versant.“
Les hommes du néolithique du village de Slatina avaient élaboré un riche système mythologique, alliant sacré et profane, indique Vassil Nikolov :
„Un vase de céramique, par exemple, symbolisait le principe féminin tant pour celui qui l’avait fabriqué que pour celui qui en avait l’usage. Le vase remplissait sa fonction utilitaire – on y préparait à manger, mais encore il reflétait le mode de perception et de pensée de hommes du néolithique : un vase qui sert à créer, à préparer quelque chose, à l’instar de l’utérus de la Déesse-Mère, leur divinité suprême. Dans ce vase les aliments crus étaient transformés en nourriture, résultat d’un geste civilisationnel. Il est le reflet de leur perception du passage à l’état sauvage à celui plus élaboré de la civilisation. “
A l’angle d’une des habitations les archéologues ont déterré une autre trouvaille impressionnante – un svastika de jade, offrande pour amadouer les mauvais esprits.
„Les trois fossés parallèles qui ceignaient le village font partie des trouvailles majeures mis au jour les deux dernières années. Les trois fossés sont d’aspect différent, le chiffre „trois“ avait probablement un sens symbolique pour les habitants de Slatina. Le fossé extérieur servait sans doute à des rituels, il est rempli de tessons de poteries, des restes de nourriture sacrificielle. Dans le deuxième fossé on a retrouvé des restes d’une cloison en bois, du côté extérieur, ce qui indique qu’il ne servait pas à défendre les habitants, mais aurait eu une fonction sacrée. Et enfin le troisième fossé, le plus étroit, qui est au centre, comporte des trous à sa base, probablement des restes d’un ouvrage en bois qu’il est difficile d’interpréter pour le moment. Des vestiges analogues ont été enregistrés seulement dans quelques villages en Europe du Sud-Est, mais leur destination n’a pas été élucidée “, dit en conclusion le prof. Vassil Nikolov.
Version française Roumiana Markova
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