Tout en étant d’origine tchèque, ils ont dédié leur vie en grande partie à la Bulgarie. Historiens, archéologues, enseignants, chercheurs en sciences naturelles, philanthropes, idéalistes : ce sont Hermann et Karel Škorpil qui arrivent en Bulgarie où ils s’établissent à la fin des années 80 du XIXe siècle.
Comme nombres d’intellectuels tchèques de cette époque, les frères Škorpil étaient mus par une sorte de solidarité slave, ils souhaitaient aider l’Etat bulgare, encore tout jeune, à se remettre après la longue domination ottomane. Ils sont connus pour être les fondateurs de l’archéologie et de la muséologie bulgare. Mais cette description est loin d’être exhaustive :
“Ce sont des personnalités polyvalentes, des hommes qui semblent nous parvenir de la Renaissance. Je dirais même qu’ils étaient parmi les derniers représentants de la Renaissance bulgare,” déclare Pétar Atanassov du Musée régional d’histoire de Varna, créateur d’une application mobile dédiée aux frères Škorpil qui a été mise au point afin de compléter par l’intermédiaire de réalité augmentée l’expérience de l’exposition qui leur a été consacrée.
“Leur nom est associé à la ville de Varna où ils ont fondé la Société des archéologues et le Musée de Varna,” explique Atanassov. “Vous êtes probablement au courant que ce sont eux qui identifient et font connaître Pliska, la première capitale bulgare. Ils sont parmi les pionniers de la recherche sur les dolmens thraces en Bulgarie. D’ailleurs, un fait souvent méconnu qui témoigne pourtant de l’importance de la contribution des frères Škorpil, est leur passion pour les sciences naturelles : la géographie, les minéraux, les espèces animales et végétales… Partout où ils allaient enseigner, ils fondaient des clubs de sciences naturelles, acquéraient des collections, découvraient de nouvelles espèces. Ils sont d’ailleurs auteurs du premier manuel de géographie bulgare.”
Aucun domaine d’études n’échappe aux frères Škorpil. Néanmoins ce qui leur tenait le plus à cœur était le patrimoine historique bulgare endommagé à cause de l’insouciance de la population locale. C’est grâce à eux que les premiers musées d’histoire ouvrent leurs portent dans les grandes villes, remplis d’objets datant de diverses époques. Un nombre important de ces artéfacts étaient arrachés aux mains des pilleurs. Pour ce faire, Hermann et Karel Škorpil avaient instauré un réseau d’”espions“ sur l’ensemble du territoire du pays, des hommes de confiance qui les prévenaient en cas d’un danger de pillage.
L’activité multiple des frères tchèques trouve toujours de l’écho :
“Les jeunes sont souvent surpris du fait que deux enseignants avec leur rémunération modeste ont pu parcourir tout le pays à une époque où les réseaux de transport n’existaient pas et qu’ils ont parvenu à réaliser tous ces exploits. Les chercheurs se fondent encore sur leurs travaux. La maison qui abritait Karel est toujours intacte. Elle est située à Varna, rue “Škorpil”. C’est lui qui l’avait conçue. Des affaires personnelles, des récits, des croquis, des dessins faits par les deux frères sont conservées au Musée d’histoire de Varna. Force est de constater cependant que nous leur devons une grande partie du reste de nos collections historiques.”
Récemment une exposition intitulée “Trouvé par Škorpil” a été inaugurée à Roussé à l’occasion du 120ème anniversaire de la création du Musée d’histoire de la ville. L’exposition est centrée sur le patrimoine de Karel Škorpil dans cette région. Il y a plus de cent ans, il a découvert et cartographié une partie importante des sanctuaires et des nécropoles dans la vallée de Roussenski Lom.
Version française : Maria Stoéva
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