Le 8 novembre, l’Eglise orthodoxe bulgare célèbre la fête des anges saints et surtout de Saint Michel Archange, patron des forces célestes dans leur combat contre les esprits des ténèbres et du mal. Dans le calendrier populaire cette fête est la deuxième plus grande d’automne après la Saint Dimitar que nous marquons le 26 octobre.
Chaque être vivant a son ange gardien qui intercède en sa faveur auprès de Dieu, qui le protège des malheurs, le conseille à commettre de bonnes œuvres, et qui souffre quand nous péchons ou que nous oublions les commandements de Dieu. Sept sont les anges qui se tiennent devant le trône de Dieu, dont un, particulièrement orgueilleux, entraîna un grand nombre de ses compagnons dans la déchéance. Depuis lors, le monde est partagé entre le bien et le mal. Guidés par Saint Michel Archange, tous les anges se tournent vers le bien. D’où la vénération de ce saint aux yeux des chrétiens. Saint Michel Archange est le symbole du bien, de la justice et de la lumière. Il est porteur de la force qui ennoblit, et les icônes le représentent avec une lance, piétinant le diable. Saint Michel Archange est aussi le patron des morts et un grand office est célébré ce jour dans toutes les églises.
Les grandes fêtes chrétiennes nous invitent à redécouvrir les racines spirituelles bulgares, et les conditions météorologiques cette année se prêtent à la visite des monastères blottis dans la montagne.
Elles sont nombreuses les églises en Bulgarie dédiées à Saint Michel Archange. L'une d'elles fait partie du groupe de monastères de la « Sainte Montagne de Sofia », situé sur le versant Nord de la montagne Plana, pas loin du village Kokaliané, à 10 km au Sud de Sofia. On y accède difficilement en empruntant un sentier sinueux et abrupt après ledit « Pont du Diable » sur la rivière Védéna (un affluent de la rivière Iskar).
C’est ici que se trouve la forteresse Ourvitch de Kokaliané, perchée sur la rive droite de l’Iskar, dans la montagne de Lozèn. A cet endroit le fleuve dessine une jolie courbe et épouse les contours de la colline en surplomb de la route qui mène de Sofia à Samokov. Sur cette colline le voyageur peut voir des restes de murs de grosses pierres. La forteresse avec son église "Saint-Elie", les cloîtres d’Ourvitch et de Kokaliané font partie de la couronne de monastères appelée la Sainte Montagne de Sofia. Pendant le Moyen Age, cet endroit voyait affluer des fidèles chrétiens en masse.
Les habitants de Kokaliané connaissent beaucoup de légendes sur la forteresse et le monastère. Selon ces légendes le trésor royal et la bibliothèque du tzar Ivan-Chichmane auraient été enfouis quelque part dans ce lieu d’accès très difficile. Les sources historiques parlent de la bataille sanglante qu’il y a livrée en 1371 contre les envahisseurs ottomans et qui a coûté la vie à un grand nombre de soldats ainsi que d’un des héritiers du trône. Toujours selon la légende le nom du village Kokaliané viendrait du mot bulgare kokal – os en français, parce que sur le champ de bataille auraient été entassés des monceaux d’ossements, abandonnés à ciel ouvert sans sépulture. Après avoir pris le monastère et la forteresse les assaillants les ont rasés.
Les fragments de scènes bibliques et de peintures murales dans la chapelle de la forteresse ont été mis au jour dans les années 70 du siècle dernier. Ils ont été restaurés minutieusement et avec grand soin ce qui a permis de les rapporter au style de peinture religieuse bien connu sous le règne des Paléologues, qui rappelle certaines œuvres de la Renaissance. Autre détail impressionnant – les restes des fresques d’Ourvitch rappellent très fort celles de l’église de Boyana.
Malgré les vicissitudes du temps, le monastère de Kokaliané a réussi à conserver ledit « Recueil d’Ourvitch », avec des éloges à Saint Michel Archange et à l’archange Gabriel. Jusqu’en 1870, c’est dans ce monastère qu’est conservé le vase du tsar avec ses fleurs incrustées, qui malheureusement a été cassé par un moine.
En ce 8 novembre, dans de nombreuses régions de Bulgarie est sacrifié un animal pour implorer la clémence du saint. Les femmes confectionnent des tourtes et des miches qui portent le nom de l’archange et de Dieu. Selon la tradition, c’est à l’homme le plus âgé de la famille de rompre le pain et de l’asperger de vin avant d’en offrir un morceau à chacun de ses proches. Le geste est accompagné de la formule : « Saint Michel Archange, Saint Nicolas et tous les saints, aidez-nous ! Nous vous célébrons aujourd’hui en faisant le vœu que le seigle pousse jusqu’au plafond ! »
Le peuple bulgare croit que lorsque le mourant sourit, Saint Michel Archange lui tend une pomme d’or. S’il meurt dans des convulsions, c’est qu’il a péché. La croyance populaire représente Saint Michel Archange comme quelqu’un de juste et de miséricordieux. Il est connu dans le folklore et l’univers fantastique des contes. Sur certaines icônes, Saint Michel Archange tient entre ses mains une balance pour mesurer les péchés des humains.
Edition : Darina Grigorova
Photos : Darina Grigorova, archives
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