Cette année le printemps est arrivé un peu tôt en Bulgarie. En effet, la météo est inhabituellement douce et la coup d'envoi de la saison du nettoyage printanier a été donné par le Premier ministre Boyko Borissov lui-même. Il a effectivement sorti le balais et à grand fracas s'est lancé à faire le ménage sur le marchés des appels d'offre publique. Il a annulé d’un seul coup des commandes publiques pour plus d'1 milliard d’euros. L’enthousiasme printanier du Premier ministre semble avoir contaminé la Commission de la concurrence, d’ordinaire plutôt apathique, bien qu’en théorie dotée de considérables pouvoirs. Elle a décidé de mettre de l’ordre sur le marché des carburants accusé de tous les pêchers du monde. L’autorité de la concurrence n’arrivait pas jusque-là à trouver les preuves nécessaires pour confirmer les soupçons d’entente illicite des distributeurs sur les prix des carburants et d’abus de situation de monopole de la part de l’unique raffinerie dans le pays. "Le temps maintenant est venu et nous sommes en possession de suffisamment d’arguments pour mener une véritable enquête", a expliqué la Commission de la concurrence, dans un contexte mondial de chute vertigineuse des prix des hydrocarbures, phénomène, qui n'a pas eu d'impact sur le marché national.  D’autant plus qu’un homme d’affaires de Varna à la réputation discutable, mais jouissant d’une grande influence vend dans ses stations-service depuis des mois à des prix à la pompe de 20% inférieurs à ceux des grands distributeurs, en affirmant qu’il ne fait que respecter les règles du marché.

La Commission de la concurrence a maintenant dans son collimateur les 7 plus grandes chaînes de distribution d’essence et de diesel, parmi lesquelles on voit des noms de sociétés multinationales de référence. Cette décision est « courageuse car elle concerne des marques mondiales de compagnies publiques », relève le vice-Premier ministre Tomislav Dontchev, en promettant à la commission « tout son soutien en cas de besoin ».

La Commission elle-même avoue que prouver les soupçons de cartel des prix est un grand défi qui exige beaucoup de travail et de temps, mais elle ne cache pas que cette fois-ci elle est décidée à aller jusqu’au bout. Or ce bout pourrait être très désagréable pour les détaillants – des amendes de 10% du chiffre d’affaires annuel qui, bien que réalisé sur un marché restreint, ne saurait être sous-estimé car en termes de prix de vente la Bulgarie se range sur la liste des premiers cinq pays européens les plus chers. Il s’agit donc de beaucoup d’argent. Ne parlons pas des éventuelles répercussions négatives sur la renommée et le prestige qui ont également des dimensions économiques et financières très concrètes.

Le public, naturellement, applaudit l’attaque de la Commission de la concurrence aux prix trop élevés, d’autant plus que nos dirigeants politiques, en la personne du ministre des Finances Vladislav Goranov à fait les bonheurs de tous les automobiliste, en laissant entendre que si se passe bien, on pourra s’attendre à une diminution des prix de distribution. Ces espoirs augmentent à la lumière du fait que l’autorité de la concurrence envisage d’enquêter non seulement sur le comportement des détaillants, mais également des producteurs de carburants. Dans le cas bulgare il s’agit d’une seule raffinerie dans le pays, la russe Lukoil, qui est suspectée d’abus de situation de monopole, car selon les documents, ses prix à l’exportation sont plus bas que les prix pour le marché domestique, qui pourtant est essentiel pour elle.

Il est en ce moment difficile à dire si les bonnes intentions de défendre les règles de la libre concurrence sur la marché des carburants en Bulgarie seront couronnées de succès cette fois-ci. Mais il n’y a pas de doutes que les arguments qu’avance maintenant la Commission pour sa campagne contre les comportements illicites sont suffisamment convaincants. La bataille contre les géants pétroliers ne sera de toute façon pas facile.

Version française : Vladimir Sabev