Martha Forsyth est l’ambassadrice américaine du folklore bulgare depuis plus de 40 ans. Elle découvre son intérêt pour les chants polyphoniques bulgare à l’université, lorsqu’elle étudie les lettres et la langue russe et s’inscrit dans un cours de folklore slave. Alors elle tombe amoureuse des chants traditionnels bulgares et à partir de 1976 elle commence à se rendre régulièrement en Bulgarie. A Sofia elle collabore avec Verguil Atanassov, Ani Ilieva et d’autres chercheurs et musicologues de l’Académie bulgare des Sciences. Avec V. Atanassov, elle visite le village de Bistritsa où elle fait la connaissance de la famille Alexandrov, visite Jeleznitsa et la région de Vélingrad pour y rencontrer les grands interprètes locaux.
« J’ai fait mes premiers enregistrements de chants en 1978, avec un magnétophone tout simple, nous confie-t-elle. Mais la qualité était bonne et en 3 mois j’ai produit 50-60 cassettes. J’ai appris qu’il ne faut pas arrêter l’enregistrement lorsque les femmes interrompent leur chant, commencent à parler et à rigoler, avant de reprendre de nouveau ».
En tant que musicologue Martha Forsyth travaille sur un domaine spécifique du chant traditionnel - les polyphonies à deux voix, spécifiques de certaines régions comme la région des Chopes, l’Ouest de la Bulgarie et de l’autre côté de la frontière en Serbie, le Pirin et les environs de Nedelino.
« Je me suis fait de nombreux amis dans tous ces villages. En 1990 j’ai invité l’ensemble Bistrishki Babi /les mamies de Bistritsa/ à une tournée de 21 jours aux Etats-Unis. En 2000, nous avons fait venir deux jeunes chanteurs du village de Nedelino, ils ont travaillé avec deux interprètes américaines du même âge. En 2006 sont venues deux femmes de Draginovo qui sont des boulangères de profession. Elles travaillent jusque tard dans la nuit et ont l’habitude de chanter pour tenir debout devant les fours. Elles connaissent les vieilles chansons authentiques auxquelles je m’intéresse ».
Après plus de 40 ans de recherches sur le folklore bulgare Martha Forsyth a accumulé des archives impressionnantes et transmis son savoir à de nombreux étudiants. En 1996 elle a publié un livre bilingue anglais-bulgare sur les chants de Linka Guéorgiéva, qui s’intitule „Listen Daughter and Remember Well“.
Ses archives représentent tout son travail de terrain et des transcriptions aussi bien de la musique que des textes. Sa collection de 4000 dossiers contient des chants interprétés de différentes manières par différents artistes. « On peut trouver une chanson avec des variantes différentes dans 5-7 villages », explique Martha Forsyth. A l’heure actuelle elle entreprend la tâche immense de digitaliser ses archives et de les déposer dans la collection de la Bibliothèque du Congrès américain, du Smithsonian Institute.
On ne peut s’empêcher de lui poser la question, pourquoi le folklore bulgare a-t-il autant de succès à l’étranger ?
« C’est difficile de répondre, mais c’est probablement parce qu’il a quelque chose d’exotique et de magique à la fois. Ces rythmes sont très particuliers, ils peuvent sembler bizarres, mais quand on s’y habitue, après on ne peut plus s’en passer. Certains n’aiment pas les chants authentiques, or moi c’est ceux-là qui m’intéressent et non pas les arrangements contemporains. J’ai toujours voulu mettre en avant ce que les gens créent par eux-mêmes, sans que quelqu’un leur dise comment faire ».
Version française : Miladina Monova
Photos: archives personnelles
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