Niché dans les replis du Rhodope oriental, à quelques encablures de Véligrand, le village Draguinovo porte le nom du père Méthode Draguinov, un prêtre orthodoxe auteur de nombreuses chroniques sur l’islamisation de la population de chrétiens bulgares peuplant le massif du Rhodope. L’espace culturel du village, fondé en 1936, est lui aussi dédié au père Draguinov et depuis près de cent ans, il veille à la préservation du patrimoine spirituel des riverains. Tout commence par l’ouverture d’une bibliothèque, avant d’installer une scène pour les artistes et chanteurs amateurs. Les chants de la région sont à deux voix, trait distinctif des régions folkloriques Chope et du Pirin.
Draguinovo est aussi le centre de nombreuses kermesses populaires et de festivals dont un défilé somptueux de costumes traditionnels. Nous avons rencontré la fondatrice et directrice artistique de l’ensemble de musique traditionnelle, Gréta Kadyova, une ancienne choriste qui est une passionnée de folklore authentique qu’elle explore depuis des années.
Notre village, situé près de Vélingrad, se trouve au cœur de la montagne du Rhodope, connu pour ses habitants généreux et leurs voix chaudes et puissantes. Sinon, Draguinovo est un grand village, peuplé de pomaks /des Bulgares islamisés/ et de chrétiens. Les chrétiens sont moins nombreux mais les deux communautés s’entendent à merveille. Il y a 48 ans, lorsque je suis arrivée dans la région, j’ai été frappée par la richesse des traditions, qui s’articulent toutes autour des cycles agricoles. L’occasion de réunir le village sur la grand’place, d’organiser de grandes veillées et surtout de grands festin partagés.
A la Saint Georges par exemple la fête dure 2 jours, mais les préparatifs commencent 2-3 semaines à l’avance. Ce qui est intéressant, c’est que les musulmans qui sont fiancés colorent le soir des œufs et les distribuent aux enfants. Le deuxième jour, ils installent des balançoires, comme au passé. Les riverains célèbrent aussi en grande pompe la fête de l’Annonciation en cueillant des géraniums dans les bois qu’ils plantent chez eux, dans leur jardin. Et de nouveau, les jeunes se réunissent et font la fête, et les amoureux se donnent rendez-vous autour des balançoires. Lorsque je suis arrivée au village, j’ai aussi été initiée à un rituel qui consiste à peindre le visage de la future mariée en employant de la poudre, des paillettes, des fils d’or et d’argent. Si le mariage est le samedi ou le dimanche, le maquillage est « appliqué» dès le vendredi, lorsque les cheveux de la jeune femme sont aussi tressés. Une jolie coutume à la limite des traditions païennes qui est toujours pratiquée…
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