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Stefan Stambolov et la politique macédonienne de la Bulgarie à la fin du XIXe siècle

Stefan Stambolov (1854-1895)

L’ancien premier ministre de la Macédoine du Nord Ljubčo Georgievski était l’invité de l’épisode 160 du podcast "Corridor 8" des journalistes Atanas Vélitchkov et Gueorgui Stankov, répondant pendant deux heures et demie à des questions en ligne. Georgievski a critiqué les travaux infructueux depuis trois ans de la commission historique bilatérale chargée de mettre au clair les questions litigieuses entre la Bulgarie et la Macédoine du Nord et a proposé que ses séances soient ouvertes aux citoyens des deux pays. Le fait est que nous voyons persister jusqu’à nos jours une pression exercée sur les citoyens macédoniens qui s’identifient comme Bulgares, a indiqué Georgievski, réclamant une politique de sanctions d’une telle stigmatisation des Bulgares macédoniens. Il a d’autre part qualifié de politique malavisée le veto de la Bulgarie à l’adhésion de la Macédoine du Nord à l’UE (levé en juin 2022). L’ancien chef du gouvernement macédonien précise que ce type de politique est mené par la Bulgarie depuis l’époque du premier ministre Stefan Stambolov.

Nous marquons aujourd’hui les 170 ans de la naissance de Stefan Stambolov, ce qui est une bonne occasion de rappeler la politique macédonienne de ce bâtisseur de la Bulgarie moderne à la fin du XIXe siècle. En tant qu’ancien révolutionnaire qui a pris part à trois insurrections pour la libération de la Bulgarie des cinq siècles de domination ottomane (celles de Stara Zagora en 1875, d’Avril en 1876 et de Kresna-Razlog en 1878-79) Stambolov connaît parfaitement les capacités de l’activité révolutionnaire bulgare et se rend très bien compte qu’elle peut facilement être exploitée par les Grandes puissances à leurs propres fins dans les Balkans. Stambolov considère que seul l’État bulgare est un facteur politique responsable et légitime.

Le cadre déterminant la politique étrangère de Stambolov est le Traité de Berlin de 1878. Au prix du morcellement des terres peuplées par des Bulgares ethniques il parvient à préserver la paix dans les Balkans jusqu’en 1912. La Macédoine demeure dans l’Empire ottoman, mais le traité donne des possibilités de réformes et d’autonomie des trois régions administratives (vilayets) avec une population bulgare, celles de Skopje, de Bitola et de Thessalonique.

L’ingérence russe dans la politique bulgare après la Réunification en 1885 mène à une guerre diplomatique et hybride entre Sofia et Saint-Pétersbourg. Stambolov voit que sous la pression austro-hongroise la Serbie, soutenue par la Russie, a des visées sur la Macédoine. La Grèce agit de même sous la pression de l’Angleterre et la Turquie. Pour améliorer la situation des Bulgares dans cette région et les protéger de la propagande grecque et serbe, le premier ministre bulgare mise sur les bonnes relations avec la Sublime Porte. Il s’efforce d’augmenter les possibilités d’éducation de l’Exarchat bulgare à Tsarigrad (Istanbul), avec la nomination de métropolites bulgares et l’ouverture d’écoles bulgares en Macédoine.

Pendant les trois insurrections anti-ottomanes auxquelles il prend part, Stambolov comprend le conseil de Vassil Levski de ne pas jouer à la révolution avec le peuple. Tant qu’il est premier ministre, il ne permet pas la création de comités révolutionnaires et autres conspirations. C’est pourquoi l’Organisation révolutionnaire intérieure de Macédoine et Edirne (VMORO) ne voit le jour qu’en 1893, fondée par les professeurs bulgares du lycée de Thessalonique. L’organisation coordonne ses activités pour la libération des Bulgares de Macédoine avec l’État bulgare, officieusement et au prix de grandes dissensions internes. Dissensions qui provoquent des luttes intestines au sein de VMORO et un dépérissement fatal de la cause bulgare en Macédoine.

« L’histoire de la Macédoine est la partie la plus romantique de l’histoire de la Bulgarie », répondit le président Pétar Stoyanov à une question d’un député macédonien le 27 avril 1997 à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe à Strasbourg. « Cette phrase n’avait pas été préparée à l’avance. Partie romantique parce que la Bulgarie tout entière est au courant du mouvement de rébellion dès le début. C’est notre seconde Insurrection d’Avril. Nous, les Bulgares, ne pouvons pas renoncer à cette page de notre histoire », explique Stoyanov sur la TV publique bulgare des années plus tard. La Macédoine est malheureusement aussi la page la plus tragique de notre histoire. Un exemple de cette tragédie est l’assassinat en 1895 en plein centre de Sofia de Stefan Stambolov, l’homme d’État qui a émancipé et modernisé la Bulgarie après la Libération de 1878. Ses meurtriers sont des Bulgares macédoniens conduits par le terroriste professionnel Naoum Tufektchiev.

Monument de Stefan Stambolov à Sofia


Crédits photos: BTA, archives

Version française : Christo Popov




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